Cessez de vous peser, jetez votre balance !

Nombreux sont ceux qui ont le réflexe de se peser régulièrement, tous les matins, voire plusieurs fois par jour. Qu’indique vraiment cet acte ritualisé, quelles en sont les conséquences et comment s’en sortir ?

Qu’indique vraiment la pesée ?

La pesée indique un poids. Elle ne représente absolument pas un volume, ni une taille de vêtement. Une personne peut aussi bien mesurer 1,70 m, peser 60 kilos et porter du 38 ou du 42 ! Notre poids n’est pas affiché sur notre front lorsqu’on se promène dans la rue. On se promène avec un corps qui possède un certain volume, et c’est ce volume que l’on aimerait modifier. Perdre en volume signifie maigrir ; prendre en volume veut dire grossir. La relation entre le volume et le poids est la densité, ou la fameuse différence entre le kilo de plume et le kilo de plomb. Par conséquent, la réalité de la pesée peut être décrite ainsi :
  • On peut maigrir et prendre du poids.
  • On peut grossir et prendre du poids.
  • On peut maigrir et rester au même poids.
  • On peut grossir et rester au même poids.
  • On peut maigrir et perdre du poids.
  • On peut grossir et perdre du poids.

    Le poids ne reflète en aucun cas le volume du corps, qui est en revanche révélé par la taille de vêtements.

La pesée, un facteur déclencheur de prise de poids ou de crise alimentaire

En quoi le fait de se peser peut-il déclencher des crises de boulimie ? Que reflète le poids indiqué sur la balance ? Manger servirait à étouffer l’intensité émotionnelle.

Que peut susciter la pesée ?

  • de la honte ou de la colère lorsque le chiffre ne convient pas à la projection que l’on s’en était faite ou à l’objectif fixé ;
  • de l’anxiété accompagnée de la crainte que ce poids ne remonte ;
  • un jugement sur soi : « Je n’ai pas de volonté » , « J’aurais pu mieux faire ! »

 

L’humeur de la journée dépend alors du poids affiché sur la balance. À 100 grammes près, la pesée peut déclencher une crise : 59,9 kg, ce n’est pas 60 kg. La pesée peut être dans bien des cas un outil de contrôle non fonctionnel, mais obsessionnel et addictif.

D’où vient cette obsession du poids ?

« Mon mari déteste la balance ! Tous les matins, c’est le même rituel : je me lève, j’enlève ma chemise de nuit, et je monte sur ma balance. Et même si avant la pesée tout allait bien, j’étais heureuse, je me sentais légère ; après la pesée, c’est souvent une catastrophe ! Je suis énervée, je me sens nulle, je me sens moche, je me sens grosse. Mon mari ne comprend pas. Il déteste cette balance ! C’est vrai qu’avant j’étais la même qu’après, et pourtant avant ça allait, après je me déteste ! »

Le nombre indiqué sur la balance représente surtout un symbole de vie, un symbole de réussite, un objectif à atteindre qui mesure la puissance de la volonté irrationnelle que l’on doit exercer pour atteindre ce graal.

Quand la balance pèse notre journée

Cette pesée est donc responsable de l’état émotionnel de la journée. Le chiffre qu’indique la balance attribue en effet soit la coupe du vainqueur (le patient est ravi, content, comme libéré), soit dans le cas contraire, des coups de fouet : la pesée punit pour dire qu’on a mal agi.

La pesée des âmes

L’œuvre « La pesée des âmes » représente l’archange Michel jugeant la vie et, ainsi, la valeur des âmes à l’aide d’une balance : une scène du jugement dernier dans le christianisme. Il est très intéressant de constater que depuis le Moyen- ge, la pesée est associée à un jugement des bonnes ou mauvaises actions. On pèse le corps comme on pèse les âmes ! La lourdeur est alors diabolisée : si l’âme est lourde, elle doit aller en enfer. À l’inverse, si elle est légère comme une plume, elle a gagné le droit d’entrer au paradis. Cette croyance perdure encore aujourd’hui. Plus on perd de poids, plus on imagine que le bonheur va frapper à notre porte. Si on atteint le poids voulu, on aura donc le droit à notre place au paradis terrestre.

Le poids représente alors, non seulement une masse de tissu biologique, mais aussi un individu dans son ensemble. Il est ainsi plus aisé de comprendre pourquoi il est si difficile de se détacher du jugement pondéral.

La pesée responsable de la prise de poids ?

Aberrant, mais vrai ! La pesée déclenche un comportement alimentaire totalement inapproprié via un désir de reprise de contrôle de la gestion alimentaire par le « savoir » et non par le ressenti.

En cas de résultat plutôt positif, la pesée peut déclencher un comportement complexe paradoxal : l’autorisation de manger plus que d’habitude. « Puisque j’ai perdu du poids, j’ai le droit. » Cette hyper autorisation donne lieu un peu plus tard dans la journée à un lâcher-prise ou plutôt, « lâcher-crise ».

En cas de résultat négatif, d’une prise de poids, un effet punitif se met en marche : « Foutu pour foutu : autant en profiter ! », « Même quand je crise, je prends du poids, je suis désespéré, alors je crise ! » La crise sert alors de pansement face à la déception de la prise de poids.

Libérez-vous de votre addiction à la pesée !

La balance peut tantôt vous décerner une coupe, tantôt vous flageller. Quoi qu’il arrive, quel que soit le résultat, elle impacte vos choix et votre comportement alimentaire.

  • Qu’en est-il pour vous ? Pourriez-vous vous décrire comme accro à la balance ?
  • Faites-vous partie de ceux ou celles qui se pèsent 1, 2 ou 3 fois par jour ?
  • Êtes-vous accro à votre balance

 

Si vous êtes de ceux qui se pèsent régulièrement, avec le même rituel, tous les jours, voire plusieurs fois par jour, ne serait-ce pas le moment de vous libérer de cette addiction ?

> Si vous sentez ou savez que vous souffrez de ce type d’addiction comportementale et alimentaire, je vous propose de vous procurer mon livre : « Je me libère de ma boulimie » Dans le cas contraire, je vous invite à lire “Je mange et je suis bien” publié aux éditions PUF.
Ils vous seront tous deux d’une aide précieuse.

> Pour que la balance ne contrôle plus votre vie, faites-vous aider par des diététiciens-nutritionnistes comportementalistes ou psychologues qui utilisent différents outils thérapeutiques comme l’analyse fonctionnelle alimentaire, les principes de pleine conscience ou encore la thérapie ACT, pour accompagner au mieux leurs patients et pour les libérer de ce rituel dont ils sont esclaves.

La pesée, comme tout autre type de comportement ritualisé, aboutit souvent à une véritable addiction qui, au final, peut peser lourd dans une vie : “Je me pèse, je me déteste, je mange” ou “je me pèse , j’adore, donc je peux me lâcher, donc je reprends du poids, donc je me pèse, je me déteste », etc.

Si c’est le cas, cela signifie que seul un accompagnement professionnel sérieux et personnalisé, avec des experts spécifiquement formés, peut aider le patient à sortir de ce cercle infernal. L’accro à la pesée ritualisée doit franchir le premier pas, celui qui demande le plus de courage : prendre un rendez-vous initial afin d’établir un bilan des troubles qui permet de mettre en place un protocole de soin adapté à chaque personne.

Se libérer de sa balance, c’est possible ! La jeter, on y parvient ! En route vers la liberté !

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Florence Pujol

Je suis Diététicienne-Nutritionniste Comportementaliste spécialisée dans les troubles des conduites alimentaires.

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